Dans le cadre de la réforme de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (LCPE ), la porte-parole en environnement du Bloc Québécois, Monique Pauzé s’entretenait cet après-midi avec des représentants de Nature Canada et Vigilance OGM qui souhaitent faire part de leur recommandation relativement à la partie 6 de la Loi qui a pour but de régir les « substances biotechnologiques animées », dont les animaux génétiquement modifiés (GM).
Selon Mark Butler (Nature Canada) et Thibault Rehn (Vigilence OGM), la Loi ne permet toutefois pas de contrôler adéquatement les avancées rapides de la technologie, comme les CRISPR ou le forçage génétique. Ils expliquent que l’absence de participation du public signifie notamment que de nouveaux organismes GM peuvent apparaître n’importe quand et être autorisés sans que la population les accepte et en débatte, ou sans le consentement des peuples autochtones.
Il faut savoir que le Canada a été le premier pays au monde à autoriser la production commerciale d’un animal GM et le peuple canadien a été le premier à consommer un animal GM – à son insu. L’introduction du saumon AquAdvantage, un saumon de l’Atlantique GM qui contient du matériel génétique de deux autres espèces de poisson, démontre que le Loi canadienne sur la protection de l’environnement ne protège pas la nature des dangers et des conséquences non désirées du génie génétique. Comme d’autres, Nature Canada a démontré les problèmes découlant de l’autorisation du saumon GM.
Pour les deux environnementalistes, le Comité permanent de l’environnement et du développement durable de la Chambre des communes, le comité ENVI, a fait des recommandations sur la Partie 6 dans son étude de 2016-2017, mais le manque d’attention relatif porté à cette Partie par le Comité et le gouvernement dénote la persistance d’une conception dépassée du champ de la biotechnologie et de ses répercussions sur la nature et la société. Nature Canada pourra considérer la LCPE comme « modernisée » seulement à la suite d’une réforme de la Partie 6, c’est pourquoi l’organisme émet plusieurs recommandations.
RECOMMANDATION 1
Aligner la réforme de la LCPE sur les droits des peuples autochtones, notamment pour harmoniser la LCPE avec la s.35 de la Constitution et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
Une majorité de membres de la Chambre des communes et la plupart des partis politiques fédéraux appuient systématiquement cette orientation. D’autres lois fédérales, comme la Loi sur les espèces en péril et la version récemment amendée de la Loi sur les pêches et la Loi sur l’évaluation d’impact, même si elles n’ont pas encore été mises à l’épreuve, pourraient guider l’alignement de la LCPE sur les droits des peuples autochtones. Toute révision ou réforme de la
LCPE doit s’attaquer au vide réglementaire en ce qui a trait à la protection environnementale sur les terres autochtones.
RECOMMANDATION 2
Reconnaître le droit des Canadiens à un environnement sain comme l’a fait le Bloc Québécois.
Les recommandations 3,4 et 5 d’ENVI appuient le droit des Canadiens à un environnement sain, à l’instar du gouvernement aux sections 5.1 et 5.2 de sa réponse.
RECOMMANDATION 3
Inverser le fardeau de la preuve en interdisant le développement, la fabrication, l’importation ou l’usage d’un organisme vivant tant qu’il n’a pas été démontré qu’on peut l’utiliser de façon sécuritaire. Des recommandations similaires ont été émises dans le cas des substances chimiques extrêmement préoccupantes.
ENVI recommande d’inverser le fardeau de la preuve dans le cas des substances extrêmement préoccupantes (rec. 41) et le gouvernement a accepté de considérer cette recommandation (section 3.5.2). Nous recommandons une approche similaire pour les organismes GM.
RECOMMANDATION 4
Réformer l’évaluation des risques et mieux utiliser la science dans la prise de décision.
À l’heure actuelle, les scientifiques d’ECCC ou du MPO doivent évaluer les risques liés aux organismes GM dans le cadre du processus d’approbation. Le risque s’exprime par le niveau de danger x le niveau d’exposition. Dans les deux évaluations menées sur le saumon GM, les scientifiques du MPO ont conclu à un risque environnemental élevé en raison de son invasivité, mais un risque d’exposition faible puisque la plupart des poissons sont des triploïdes produits dans des installations terrestres. Le risque global a donc été évalué comme faible par le MPO.
On sait toutefois qu’une commercialisation accrue entraînera une augmentation du risque d’exposition vu l’augmentation du nombre d’installations et de la production de poissons, ce qui suppose une probabilité de près de 100 % de contamination génétique des stocks sauvages. Toute évaluation des risques doit reconnaître le risque cumulatif et tenir compte notamment de la commercialisation et de l’usage accrus au fil du temps.
ENVI appuie une approche plus globale de l’évaluation des risques dans ses recommandations 45 et 46, comme le gouvernement aux sections 3.4.3 et 4.4.2 dans son rapport de suivi. Ces recommandations ne font aucune mention des organismes GM.
RECOMMANDATION 5
Rendre obligatoire l’étiquetage des aliments et produits de consommation qui contiennent des organismes GM (« substances biotechnologiques animées »). La LCPE ne contient aucune disposition relative à l’étiquetage.
ENVI recommande l’étiquetage obligatoire des substances toxiques dangereuses.
À cet effet la députée fédérale de Repentigny, Monique Pauzé, a tenu a rappelé qu’en 2017, les libéraux de Justin Trudeau et les conservateurs bloquent l’étiquetage obligatoire des produits génétiquement modifiés (GM).
Ce, malgré les sondages qui démontraient clairement qu’entre 81 % et 95 % des Canadiens étaient en faveur de l’étiquetage de ces aliments. Récemment, un sondage commandé par le Réseau canadien d’action sur les biotechnologies (mené par Ipsos Reid) a établi que 88 % des Canadiens veulent l’étiquetage obligatoire.
Malgré cet appui constant du public pour l’étiquetage des aliments GM, les députés libéraux et conservateurs ont voté contre le projet de loi C-291, visant à rendre obligatoire l’étiquetage des aliments génétiquement modifiés.
Déjà en 2016, le Bloc Québécois martelait que les consommateurs avaient le droit de savoir ce qui se trouve dans leur assiette. Ils devraient aussi avoir le droit fondamental de refuser de se nourrir avec des produits génétiquement modifiés (GM) s’ils le souhaitent.
À ce moment-là, l’administration Trudeau s’empressait de régler bon nombre de dossiers à coup de bâillons, mais refusait toujours de se prononcer en faveur de l’étiquetage quand venait le temps de parler du saumon génétiquement modifié d’AquaBounty.
À Ottawa, il semble y avoir un certain laisser-aller alors que le gouvernement Trudeau ne juge même pas pertinent d’informer la population, ne serait-ce que par le biais de l’étiquetage, déplorait Monique Pauzé.
RECOMMANDATION 6
Intégrer à la Partie 6 des processus transparents, notamment en matière de participation productive du public et d’acceptation éclairée. Comme d’autres, nous sommes d’avis qu’il faut amener la LCPE dans le XXIe siècle. Il faut améliorer grandement la transparence et la reddition de comptes de la LCPE.