Le projet de loi concernant la transparence et la responsabilité du Canada dans le cadre de ses efforts pour atteindre la carboneutralité en 2050 (C-12) qui sera présenté à nouveau aux Communes ne répond pas à l’urgence climatique. Encore une fois, il s’agit d’un petit pas alors que nous avons besoin d’un grand saut en avant. C’est mieux que rien, mais ce projet de loi ne contient aucune cible et aucun mécanisme de responsabilisation. Tout cela parce que les libéraux, comme les conservateurs, n’en veulent pas, mais aussi parce que les néo-démocrates, par pur opportunisme, ont trahi les idéaux qu’ils ont jadis défendus.

Une loi efficace aurait nécessité des cibles définies et contraignantes, pas seulement d’une campagne de relations publiques, mais le gouvernement Trudeau en est un d’image. Le 22 avril dernier, lors du Jour de la Terre, le ministre de l’Environnement, Jonathan Wilkinson se pavanait devant les médias pour annoncer de nouvelles cibles de réduction de gaz à effet de serre d’au moins 40 % d’ici 2030.

Pendant ce temps, en Chambre, le Bloc québécois par l’intermédiaire de ma collègue Kristina Michaud, a demandé au gouvernement s’il allait insérer cette cible dans son projet de loi C 12. Le ministre du Patrimoine canadien, Steven Guilbeault, reconnu pour son expertise environnementale l’a promis et je le cite: « […] effectivement, nous inscrirons dans le projet de loi C-12 la cible du Canada pour 2030 en matière de lutte contre les changements climatiques. »

Or, non seulement le gouvernement Trudeau ne l’a pas fait, mais il a empêché le Bloc québécois de faire inscrire des cibles chiffrées dans ce projet de loi. Cela veut dire que, encore aujourd’hui, ces cibles sont aussi contraignantes qu’une résolution du jour de l’An. Or, je le rappelle, le fédéral n’a jamais tenu ses résolutions. Il a échoué à remplir ses promesses que ce soit avec l’Accord de Kyoto en 2012, celui de Copenhague en 2015 et l’Accord de Paris en 2020. Si le passé est garant de l’avenir, ça augure très mal pour les générations futures.

Transparence et responsabilité

Le projet de loi a été accueilli froidement au Sénat qui a visiblement compris rapidement l’essence même de C-12. La sénatrice Paula Simons a eu raison d’interpeller le ministre  Wilkinson : « Le nom même de la loi comprend des mots comme transparence et  responsabilité, mais je ne vois pas de véritable mécanisme de responsabilisation, et pouvez-vous nous dire comment vous voyez cette loi aller au-delà des belles paroles sur un morceau de papier? »

La raison pour laquelle ce projet de loi n’ira pas plus loin que le bout de papier sur lequel il est écrit est simple, les libéraux avec l’appui du NPD ont battu 32 des 33 amendements du Bloc qui auraient forcé le gouvernement à être imputable de ses actes. L’un de ces amendements exhortait les gouvernements à rendre des comptes via un rapport annuel. Une loi climat efficace impliquait que le gouvernement divulgue les informations pertinentes aux citoyens afin qu’ils puissent évaluer l’efficacité de ses politiques. Cela n’arrivera pas.

Un bel exemple de gouvernance climatique est celui du Royaume-Uni qui a réussi à diminuer ses émissions de 28% depuis 2010. Au sommet des actions qui ont permis d’en arriver à de tels résultats, l’indépendance entière d’un comité d’experts.

Voilà pourquoi il était important pour le Bloc québécois de mettre en place un tel comité qui ne serait pas relayé au même pied d’égalité que les autres intervenants lors de la prise de décisions importantes. Le gouvernement Trudeau a beau dire qu’il se base sur la science quand il prend ses décisions, mais c’est de la foutaise. Son projet de loi donne la même importance aux experts qu’à tout le monde.

Pourtant, il est prouvé que lorsque l’indépendance d’un tel comité est au rendez-vous, on obtient un équilibre avec d’un côté une politique inspirée d’experts en science, en économie et en politiques appliquées et de l’autre le respect de la réalité politique où les gouvernements se succèdent au fil des ans. Malheureusement, le PLC et le NPD se sont assuré en coulisse que rien de cela ne se concrétise.

Nous devrons nous rabattre sur le commissariat à l’environnement comme seul chien de garde du bien commun. Dommage que le comité ait refusé de renforcer ses pouvoirs. Il n’y aura donc jamais de véritable évaluation du plan d’action du gouvernement et le public n’aura pas l’heure juste sur l’efficacité de la politique climatique canadienne. Des blâmes sans grave conséquence continueront d’être émis et rien ne changera.

René Lévesque avait raison « la tâche des vrais démocrates est de voir à ce que le peuple soit de plus en plus au courant, instruit, renseigné sur ses propres intérêts ». Pour ma part, le gouvernement Trudeau a doublement failli à sa tâche.