Jerry V. DeMarco, le commissaire à l’environnement et au développement durable dépose régulièrement des rapports très édifiants sur les avancées ou plutôt les ratées du gouvernement Trudeau pour atteindre les cibles qu’il s’est fixées en entérinant l’Accord de Paris.

En novembre, le commissaire a déposé cinq nouveaux rapports et je vais m’attarder aujourd’hui sur celui qui concerne précisément les changements climatiques et qui directement lié aux engagements internationaux du Canada.

Malgré tous ses plans de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), et peu importe ce qu’en dit l’ex-écologiste devenu ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, le Canada n’a aucune chance ou presque d’atteindre ses cibles.

Je vous donne tout de suite les conclusions du rapport:   le Canada va encore échouer à atteindre ses objectifs. Ce n’est ni moi ni le Bloc qui le disons, mais un expert indépendant.

Je ne suis aucunement surprise. Le gouvernement Trudeau a pris du retard pour réduire ses GES et il mise sur des technologies qui n’ont pas fait leurs preuves. Le jovialisme est omniprésent chez les libéraux.

Pourtant, le commissaire écrit : Le Canada est le seul pays du G7 qui n’a réalisé aucune réduction des émissions depuis 1990. Pire encore : le Canada est un cancre.

Le commissaire expose l’hypocrisie des libéraux et de ce qui l’a précédé au grand jour :

« Les émissions au Canada sont plus élevées aujourd’hui que lorsque le pays et le monde se sont engagés pour la première fois à lutter contre les changements climatiques, il y a de cela plus de 30 ans. Des objectifs et des plans ont été établis et abandonnés, et le Canada tarde encore à obtenir des résultats. Entre-temps, la nécessité de renverser la tendance des émissions de gaz à effet de serre au Canada est devenue de plus en plus pressante. Ce n’est pas la première fois que je lance ce cri d’alarme, et je continuerai à le faire tant que le Canada n’aura pas renversé cette tendance. »

Je ne peux que féliciter M. Di Marco qui se tient debout devant tous les élus qui mettent en doute la crise climatique.

Son rapport est clair : « Le gouvernement fédéral peut encore réduire ses émissions et atteindre son objectif pour 2030 en faisant preuve de leadership et en prenant des mesures ciblées et dynamiques. La mise en œuvre de nos recommandations serait un pas dans la bonne direction.

Des solutions existent, le problème n’est pas que les solutions manquent, mais plutôt qu’elles sont mises en œuvre bien trop lentement. Il faut que cela change maintenant. »

Le commissaire termine en disant : « En conclusion, je souhaite réitérer qu’il sera bientôt trop tard pour éviter les effets catastrophiques des changements climatiques. Les feux de forêt intenses, la fumée dans le ciel, les vagues de chaleur, les orages violents et les inondations sont de plus en plus graves et fréquents, et ce sont les Canadiennes et Canadiens partout au pays qui en subissent les conséquences. »

Les secteurs coupables sont bien évidemment le secteur des énergies fossiles.  Le gouvernement fait valoir qu’il s’en occupe radicalement alors que les subventions continuent de pleuvoir sur ce secteur.

De nombreux pays n’atteindront pas leurs objectifs me direz-vous.  C’est vrai, malheureusement. Les compagnies pétrolières pensent augmenter leur production et les gouvernements sont à la botte des lobbies pétroliers.  Selon l’Agence internationale de l’énergie, la demande pour le pétrole a augmenté en 2023 et une hausse est prévue encore pour 2024.

Le président de la COP28, le Sultan Al Jaber, lui-même PDG d’une grande entreprise pétrolière, le dit : il faut répondre à la demande.  Voilà, c’est dit : la faute est aux consommateurs…encore une fois.

Ne peut-on assumer un leadership dans ce domaine. Quel gouvernement sur cette planète aura assez de courage pour dire NON à l’exploitation pétrolière qui fait augmenter la fièvre planétaire?

Pendant qu’on blâme les individus, les producteurs eux s’en mettent plein les poches et dépensent des sommes faramineuses en publicité pour nous faire croire qu’ils sont plus verts que verts. Parlant de publicités nuisibles, mentionnons que les constructeurs automobiles dépensent des montants colossaux pour faire la promotion de véhicules énergivores. Ces industries ne sont pas les seules qui méritent d’être pointées du doigt, que dire  de leurs alliés et des nombreux politiciens qui ne sont que les pions des pétrolières et gazières?

Si on regarde un peu le détail des rapports du commissaire, on y découvre qu’Environnement et Changement climatique Canada, en consultation avec des ministères clés, a conçu un Plan de réduction des émissions pour 2030 crédible et inclusif. Les ministères responsables devaient mettre en œuvre certaines mesures en vue d’attendre les cibles de réduction des émissions de GES qui sont de 40% à 45% sous les niveaux de 2005 d’ici 2030.  Mais le Plan ne suffit pas et même si tout était mis en œuvre, l’effet espéré ne permettrait pas d’atteindre la cible.

Même le gouvernement sait qu’il n’atteindra pas ses propres cibles. Les modèles de projections d’émissions ne sont pas fiables : les hypothèses du ministère sur les projections d’émissions sont trop optimistes. La mise en œuvre des mesures d’atténuation comporte des failles considérables qui augmentent le risque de ne pas atteindre l’objectif pour 2030.

De plus, des mesures clés nécessaires ont été retardées même si certaines promesses libérales datent de 2021. (ex. règlement sur l’électricité propre, plafonnement des émissions du secteur pétrogazier, règlement renforcé sur le méthane).

Plusieurs ministères sont visés dans le Plan, après tout l’environnement c’est transversal, et la lutte aux changements climatiques devrait interpeller beaucoup plus que le seul ministère de l’Environnement.  Mais rien aucune loi, aucun règlement ne tient les ministres responsables de l’atteinte des objectifs de réduction des émissions.

Le ministre de l’Environnement peut seulement conseiller les autres ministres, mais ne peut les obliger à en faire plus pour atteindre l’objectif.

Le commissaire confirme ce que nous savions déjà : le gouvernement libéral échoue à respecter ses engagements en matière de lutte aux changements climatiques et le Canada va une fois de plus rater sa cible de réduction des émissions.

Des calculs erronés

Le Rapport du commissaire à l’environnement nous apprend que les calculs du gouvernement ne sont pas bons. Permettez-moi de citer encore une fois le rapport :

« La modélisation est un outil important pour évaluer l’efficacité potentielle des mesures d’atténuation contenues dans un plan et pour aider à déterminer si des ajustements sont nécessaires. »

Je paraphrase la suite : qu’essentiellement la modélisation doit être de grande qualité et fiable parce que le Canada ne réalise aucune réduction soutenue depuis 2005.

Il me semble que, si les calculs ne sont pas bons, il ne faut pas se surprendre qu’on n’atteigne pas nos objectifs. Ça fait 10 plans de suite qui échouent…

Mais pourquoi les calculs ne sont pas bons ?

Parce que les hypothèses du gouvernement sont trop optimistes.

En d’autres mots, le gouvernement pense que tout va bien aller, juste parce que c’est lui qui est au pouvoir.

La magie libérale est à l’œuvre.

Je cite : « Les modèles supposaient qu’il n’y aurait pas de retard dans la conception et la mise en œuvre des mesures d’atténuation »

Le gouvernement n’avait pas prévu ses propres retards !

Les libéraux se sont surestimés.

Le gouvernement mise sur des technologies qui n’ont pas fait leurs preuves comme la capture et stockage de carbone. Or, plusieurs experts ont écrit au gouvernement pour dire que cette technologie n’est pas au point et qu’en conséquence, il ne fallait pas s’y fier.

Ils sont venus ici au Parlement le dire en comité.

Ils l’ont aussi écrit dans des journaux et plusieurs dizaines de scientifiques ont écrit aux ministres concernés et au bureau du premier ministre.

Le Bloc Québécois le répète au gouvernement depuis deux ans.

Le gouvernement a quand même décidé de donner des milliards de dollars aux pétrolières pour qu’elles développent ces technologies, à la place d’investir dans les énergies renouvelables.83 milliards aux pétrolières, d’ici 2035, pour être exact. Sauf que, l’objectif climatique, c’est 2030.

Encore des subventions à des entreprises qui font des milliards de dollars de profit annuellement.Et les décisions récentes du gouvernement nous laissent pantois : accorder une exemption de la taxe carbone sur le mazout, taxe, répétons-le qui ne s’applique pas au Québec.  Mais en agissant ainsi, le gouvernement confirme essentiellement que le Canada n’arrivera pas à atteindre son objectif de réduction des émissions de GES d’ici 2030. Justin Trudeau mine ainsi sa propre crédibilité quant au changement climatique.

La COP 28 s’ouvre à Dubaï dans quelques jours. Le Sultan al-Jaber, PDG de la compagnie pétrolière nationale d’Abu Dhabi, en assume la présidence. Misère!

Est-ce qu’il y a quelqu’un sur cette planète qui prend la crise climatique au sérieux?